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« Les Miens », sur Ciné+ Emotion : Roschdy Zem filme une famille à l’épreuve

CINÉ+ ÉMOTION – JEUDI 22 AOÛT À 20 H 50 – FILM
On ne présente plus Roschdy Zem, acteur de ce qu’on appelle « la diversité », qui, sans avoir eu à se renier, incarne aujourd’hui une des plus fortes présences actorales du cinéma français. Depuis 2006, Roschdy Zem est aussi réalisateur de films, dont les titres annoncent la couleur : Mauvaise foi (2006), Omar m’a tuer (2011), Chocolat (2016)… Puis il a décidé de filmer ces Miens, qui sont les siens.
Film à soubassement autobiographique (ce qui arrive ici au personnage principal est arrivé au frère cadet de Roschdy Zem), Les Miens nous installe ainsi dans une famille élargie. Présentation inaugurale en forme de tablée. Il y a là Moussa (Sami Bouajila), qui se remet très, très mal de la séparation d’avec sa femme. Ses deux grands enfants, Amir (Carl Malapa) et Nesrine (Nina Zem, fille du réalisateur). Sa sœur, Samia (Meriem Serbah), et ses deux frères, Salah (Rachid Bouchareb) et Adil (Abel Jafri). Enfin, celui qu’on attend tout le temps, l’autre frère, Ryad (Roschdy Zem), qui rejoint à table sa compagne, Emma (Maïwenn).
En quelques séquences, nous voici à peu près mis au fait des rapports de force, des non-dits et des enjeux implicites de cette famille. Moussa, enseveli en lui-même, hésitant à révéler une situation qu’il craint de rendre sans retour en la nommant. Samia, seule au courant et dévouée. Les frères un peu lointains, chacun ayant fait sa vie de son côté.
Et, bien sûr, cette césure implicite qu’emporte avec lui Ryad le retardataire, qui s’est extirpé à la force du poignet du milieu social modeste de la famille en devenant journaliste sportif à la télévision. Auquel on fait appel en cas de besoin, auquel on reproche à mi-voix ses retards et ses fréquentes absences de réponse, et, à travers elles, la prise de distance d’avec le reste de la famille. On le voit, l’autobiographie ne s’arrête pas au frère de Roschdy Zem.
L’accident brutal de Moussa va redéployer les enjeux et faire bouger les lignes. Mis au chômage, plongé dans une existence quasi végétative, il se met à parler sans aucune retenue à son entourage, disant à chacun très exactement ce qu’il pense, qui n’est peut-être pas si loin de la vérité. Idée qu’on qualifierait de géniale sur le plan dramaturgique, si elle n’était empruntée à la réalité même.
Une extravagante comédie pouvait en sortir, Roschdy Zem lui a préféré une épure réaliste, filmée en plans-séquences enrobant un groupe à vif. Mais cette idée, un peu trop évidente, qui gouverne le film, en cache une autre, plus secrète, que décèleront, sans doute plus vite que les autres, tous les enfants d’immigrés : c’est dans la lutte pour sa survie qu’une famille se solidarise, c’est dans le confort qu’elle se dissout.
Les Miens, de et avec Roschdy Zem. Egalement Sami Bouajila, Meriem Serbah, Maïwenn (Fr., 2022, 85 min).
Jacques Mandelbaum
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